Mairie de Kati : Plus de 88 millions de FCFA d’irrégularités financières révélées par un audit – Que se cache-t-il derrière ces dysfonctionnements ?
Un audit réalisé par le Bureau du Vérificateur Général (BVG) a mis en lumière de graves irrégularités dans la gestion de la Commune Urbaine de Kati (CUK), pour les exercices 2021 à 2023. Plus de 88 millions de FCFA ont échappé aux caisses publiques, victimes de pratiques douteuses et d’une absence criante de contrôle. Ce scandale pose la question de la responsabilité et de la transparence dans la gestion des fonds publics au Mali.
Des manquements structurels révélateurs d’une administration défaillante
L’audit a jeté une lumière crue sur les carences de la Commune de Kati. Entre absence de contrôle interne, dérives administratives et non-respect des règles de gestion, la situation semble chaotique. Ce qui frappe le plus, c’est l’apparente négligence des responsables municipaux à respecter les normes financières de base.
Parmi les faits relevés :
Aucune inspection régulière : Le Préfet de Kati, en charge de la surveillance administrative, n’a effectué aucun contrôle régulier, pourtant essentiel à la bonne gestion des fonds publics.
Un contrôle interne inexistant : Le Maire et le Receveur-percepteur n’ont pas pris soin de surveiller les régies d’avances et de recettes, ce qui a ouvert la porte à des abus manifestes.
Permis d’occuper irréguliers : Des permis d’occuper, délivrés en violation des normes d’urbanisme, ont été accordés, créant ainsi un climat d’incertitude juridique dans la gestion foncière de la commune.
Ces manquements mettent en évidence une gouvernance défaillante et un manque de respect des procédures élémentaires, menaçant non seulement la crédibilité des institutions locales, mais aussi la confiance des citoyens envers leurs dirigeants.
Une gestion foncière opaque : un nid à conflits et à abus ?
L’audit montre que la gestion foncière de Kati est particulièrement problématique. Le Maire a délivré des permis d’occuper illégaux issus de lotissements irréguliers. Ce genre de pratiques est souvent la source de nombreux litiges fonciers, un problème récurrent au Mali, où la terre est une ressource précieuse.
En effet, le secteur foncier est un terreau fertile pour la corruption, comme l’a souligné Transparency International dans ses rapports. Selon cette organisation, les procédures non transparentes d’octroi de terres sont souvent une voie rapide vers l’enrichissement illicite, au détriment des populations locales, notamment les agriculteurs et les communautés vulnérables qui dépendent de ces terres pour leur subsistance.
Une hémorragie financière : 88 millions de FCFA disparus
Sur le plan financier, les chiffres donnent le vertige. Selon l’audit, un montant total de 88 064 017 FCFA a été identifié comme des irrégularités financières. Ces pertes proviennent de plusieurs sources :
43 287 584 FCFA de droits de patente et pénalités non recouvrés sur des marchés publics exécutés et payés.
32 108 100 FCFA de redevances de mariage non reversées au Régisseur de recettes.
12 668 333 FCFA de loyers provenant de magasins et terrains communaux non perçus.
Ces irrégularités reflètent une gestion financière catastrophique, marquée par un manque de suivi rigoureux des recettes publiques. Pire encore, elles mettent en lumière des pratiques qui pourraient être qualifiées de détournement de fonds.
Des actes susceptibles de poursuites pénales
Face à ces découvertes accablantes, des mesures ont été prises. Les faits relevés dans l’audit, considérés comme des infractions à la loi pénale et à la législation budgétaire, ont été transmis au Procureur de la République, chargé du Pôle National Économique et Financier. Il appartient désormais à la justice de déterminer les responsabilités et de sanctionner les contrevenants.
De plus, le rapport a été envoyé au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême et au Directeur Général des Impôts. Ces institutions devront examiner de près les conclusions de l’audit et agir pour remettre de l’ordre dans la gestion de la Commune de Kati.
Des recommandations pour un redressement en profondeur
Le Bureau du Vérificateur Général (BVG) a formulé plusieurs recommandations destinées à redresser la barre. Il est notamment suggéré de renforcer le contrôle interne, d’établir des fiches de description de poste pour clarifier les responsabilités, et de veiller à la transparence dans la gestion des recettes publiques.
Un problème généralisé au Mali : Kati, un cas parmi d’autres ?
Les irrégularités financières découvertes à Kati soulèvent une question cruciale : ce cas est-il représentatif d’une problématique plus large dans les communes maliennes ? Selon plusieurs experts en gouvernance locale, la mauvaise gestion des finances publiques et les détournements sont récurrents dans de nombreuses collectivités. En 2023, un rapport de la Banque mondiale a montré que les communes maliennes souffrent d’un manque chronique de transparence, qui freine leur développement.
Pour certains observateurs, la solution réside dans un renforcement des capacités des communes à gérer leurs propres ressources, combiné à des mécanismes de contrôle externes plus rigoureux, tel que celui offert par le BVG. La lutte contre la corruption et la mauvaise gouvernance doit se poursuivre pour garantir aux citoyens maliens une gestion plus équitable et efficace des ressources publiques.
Conclusion : des leçons à tirer et un suivi nécessaire
L’audit de la Mairie de Kati est un rappel brutal des défis auxquels sont confrontées les collectivités locales au Mali. Les 88 millions de FCFA d’irrégularités financières témoignent de la nécessité de réformes urgentes pour assurer la transparence, la responsabilité et la bonne gestion des finances publiques. Si les recommandations du BVG sont appliquées et que la justice fait son travail, la Commune de Kati pourrait retrouver un chemin de confiance avec ses citoyens.
Cependant, ce cas ne doit pas être traité comme une exception. Il est impératif que d’autres communes fassent l’objet d’un contrôle similaire afin d’éviter que ces pratiques ne se généralisent. Pour le moment, l’attente repose sur les résultats des enquêtes judiciaires et la mise en place de mesures concrètes pour éviter que ces irrégularités ne se reproduisent à l’avenir.
Sources : MaliBuzz Investigations
Rapport du Bureau du Vérificateur Général
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